vendredi 1 mars 2013

Une morsure de dessert de Frankie Pain




Ce fut pour Charlotte une morsure de dessert. Une morsure de pitbull enragé l’eut moins secouée, hébétée , lattée.
Charlotte avait été invitée  à déjeuner chez la collègue de sa petite copine. Cette demoiselle était partie chez ses parents à Périgueux : c’était une manie tous les week end. La collègue , Morgane en déposant la forêt noire au milieu de la table dit : « à Martine, à sa rencontre, à son amour . »
Charlote  est mal à l’aise , elle ne l’avait pas prévenue qu’elle en avait parlé à son travail . C’était pas le genre . Même ses parents n’était pas au courant, n’était pas au courant. Charlotte crée son sourire pour honorer la circonstance,   regarde les convives : lèvres étirées vers les ridules des yeux. Charlotte eut souhaitée qu’elle le fisse en sa présence autour d’une bouteille de champagne, après tout ce temps dans le secret.
Et la Morgane se met à faire des youcoulélé de gorges chaudes : «  oh oui, son mec Patrick, c’est vraiment un super canon , balaise , sympa. Ce qu’ils sont bien assortis , çà a l’air de marcher comme sur une piste de rallye. Je suis tellement contente,  Elle qui se traine sa solitude depuis si longtemps »
Charlotte se muselle, elle a envie d’hurler : « viens donc à la maison,  voir ta collègue et les chambres pleines de femmes qui attendent leur tour, crois moi sa solitude elle sait la ligoter » .
Charlotte est blême , le sol s’effrite sous elle, flajolante pour se dégager de la table, elle vomit les tapas , le plat de résistance, le fromage dans sa serviette basque rouge et blanche» .



Charlotte avait aimé ses montagnes bleues, ses promesses en papillote papier en or. Elle avaient cessé sa guerre avec les poches kangourous pour celle des petites culottes en dentelles, le soutien gorge, le parfum : Mademoiselle Dior
Ces 5 amants avaient été fort dépités à la nouvelle de son « folling in love for a wife », leur Désirade, leur Charlotte aux fraises , à la pistache, à la noisette au chocolat évaporée dans des jupons.
Là aussi pour eux cela avait une surprise : toile Aimeri. Chao , dépression . Une fois par semaine Charlotte compatissante à leur état de grande tristesse les retrouvait pour faire des crêpes et jouer au tarot. Les rassurer aussi, «  c’est  pas la question du sexe pour elle mais une personnalité .Comme la phrase de Montaigne : parce que c’était elle, parce que c’était moi » . Ravageuse. Esbrouffante.  Un art chinois de créer du manque : un soufflet de forge du désir. Montagnes bleues . voler au-dessus de l’Ourale avec sa miss Dior .Le premier mois. Après l’attente d’elle en pyjama dans le verre futur à dentier sur la table de nuit. Cela semblait toujours remis  à perpètre. Et dieu si la demoiselle n’était pas une rivière tranquille. Avec  son ex femme Sécotine disait elle,  elle ne pouvait se séparer .Et là Charlotte très humaniste et philosophe pleine des théories post 68 – qu’elle croyait- : « c’est pas parce que tu m’aimes que tu ne peux  continuer à l’aimer , mais je n’ai pas le profil la femme d’une femme maquée  alors nous vivrons sous ton toit à trois . Sous ce toit à trois, il y avait aussi les deux chiens, les deux chats et le piano de l’autre dame. Heureusement la maison était grande, chaque femme avait sa chambre et quand la dame parfum voulait son lit à elle , elle avait le salon avec ses bêtes.


Elle était pas commode la bougresse : jamais un planning des nuitées . Pour les  retenir chaque soir sous le toit. Pas d’autres planning le soir de possible. Charlotte avec ses 5 compagnons tenaient en chœur, le planning afin que chacun puisse profiter de sa liberté les temps sans leur Charlotte. C’était simple  au resto Universitaire ils mangeaient le midi tous ensembles afin de parler des affaires courantes, des coups de mains à donner aux uns , aux autres et de caler les moments avec chacun . le weekend  : chacun avait droit à un weekend en alternance . Cette règle s’était imposée d’elle même . Tous avaient un très grand respect réciproque.  Pour Charlotte la régence de  cette femme faisait bouillir la Charlotte mais l’autre femme passait tout à sa Reine alors.
Il fallait faire le pied de grue pour attendre qui hériterait de la Miss au lit et certains soirs cette tendresse aux vapeurs bleues ressemblait à un plat de morue bien salée, sèche comme celle de la sécherie  de Bègles d’à coté. Là c’était la meilleure,  cette pure en « lesbiennitude »  s’était entichée d’un Homme.
Quelle morsure de dessert ! La forêt noire c’était le cas elle était brune .


Le bruit nouveau dans ces rituels , ce médicament chaque soir qu’elle prenait, Charlotte  pensait aux surmenages et petits somnifères. Non . Le bruit du tiroir, le papier d’alu qui s’ouvre, le verre d’eau , le temps d’hésitation avant l’absorption. Elle n’aimait pas prendre ses médicaments, elle faisait toujours un cinéma  pour ce genre de détail, elle avait son petit côté masculin difficile à soigner.

D’ailleurs c’est ainsi que la Charlotte la fit bailler du bassinet . Cette demoiselle en cas de litige , il fallait un burin sculpteur des marbres de Carrare pour la faire articuler quelques mots . Une taiseuse. Charlotte avait trouvé . Dérober la boite de pilule de son tiroir. Affolée l’autre  chercha partout alors Charlotte sortit dans la pièce du piano où elle se trouvait : « t’inquiètes pas , tu auras de la pilule du lendemain  ou tu le garderas , toi qui voulait que l’on porte tes enfants.. mais toi non et bien la vie en a voulu autrement. »
Elle était pitoyable. Elle aurait eu un fusil , elle aurait tirer sur Charlotte. Madame était courroucée ben voyonsla mémére elle n’aimait pas perdre le manche . L’autre dame était sortie de sa chambre : « mais qu’est-ce que tu lui fais encore ? ». La Charlotte : «  si tu la gâtait moins, on pourrait  être moins esclaves »  « et toi  annonces lui la nouvelle , tout le monde le sait ,sauf nous , » elle fait son iceberg attitude :  butée ,fermée : c’est pas l’heure de sa marée. Le chien loup jappe : on touche à sa maîtresse, les chats deviennent fauves , alors voyant qu’elle ne sortirait rien,  une fois de plus : « elle fréquente  un mec , il s’appelle Patrick. Elle a simplement perdu sa boite de pilule, elle tremble la  pauvre carcasse d’être enceinte,  c’est pas du pipi chat , elle,  la pucelle  aux diatribes anti mâles,  « essssssshé » qu’elle ne nous y prennent plus :   elle a consommé. »

Elle quitta le couple qui s’étripait . Les larmes étaient au stade du mur du son. Charlote regagna sa chambre , la tête dans le vide sur son balcon dans l’odeur des géraniums rouges rose et des pétunias blanc et violet pourpre , pour la première fois, elle vit une barrière de passage à niveau tombait sur son ventre comme lui brouillant ce membre invisible qu’elle n’avait jamais voulu avoir mais qui pour une fois la mettait dans une impossible situation lui était un homme elle une femme Point. Une femme, elle supportait, les différences étaient repérables. Son empathie pour ses compagnons s’amplifia ils pleurèrent tous ensembles  blottis les uns dans les autres comme une grandes portée de chiens sur le grand sofa lit devant la cheminée de la maison qui les rassemblait toujours. Elle avait fait sa valise et donné 15 jours à la femme  au parfum Dior pour qu’elle vive à l’unisson avec  ce monsieur Patrick dans leur appartement  et conseilla à l’autre d’en faire autant. Il fallait qu’elles sachent . Dans les situations douloureuses poser rapidement un diagnostique et intervenir en conséquence. Ses gardes en tramato au CHR l’avaient bien élevée dans les actes à poser.
 
L’autre femme ne revint jamais. Patrick était l’homme qui avait commencé à lui faire la cour. Charlotte revint, elle ne sut jamais ce qui s’est passé entre eux, il n’était plus là , elle cessa le rituel pilule. Charlotte vit encore là heureuse de l’avoir retrouvée sa dame parfumée à Mademoiselle Dior . Elle revint un jour plus tôt d’un voyage d’études, la maison était peuplée des oripeaux d’une autre femme. Alors elle retourna à l’université chercher son  amie de recherche , déménagea dans l’après midi. Le temps passait les perles se multipliaient,  son rêve des montagnes bleues roussies comme un feu d’été, sa championne ne pouvait aimer à moins de deux  et sous des règles inconcevables pour l’éthique de vie de Charlotte et dans la balance de son bonheur : l’équation était une ration de guerre. La vie se gagne en inondant plein de mouchoirs bleus à carreaux blancs en pur coton qui peuvent bien bouillir dans la lessiveuse afin les rendre sans traces à un autre usage. In challa.
de Françoise pain de La Mangou
dans l'atelier 2 de Bruno Qu. pour l'accompagnement à son tour de chant




Atelier 2 avec Bruno



1 la guerre est finie

2 rêve de champion

3 les morsures de l’aube

4 les autres

5 esprit libre

6 les montagnes bleues




7 commentaires:

  1. Belle création, aussi ébouriffante que la vie! Bravo!

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    1. merci giné de ta lecture ébouriffante ! quel superbe écho au texte . merci.

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  2. Tes mots me tourneboulent toujours Frankie, ton écriture est comme un scalpel qui autopsie le coeur;
    je t'embrasse

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    1. ma chère Josette, tes mots après tes lectures m'offre la joie de ta haute perception. mille Bisous

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  3. Une forêt noire au goût de fer saignant à blanc des rêves à sens unique. La gifle cuisante des attentes auxquelles un parfum de musc vient tordre le cou. Et tes mots Franckie, ces mots acérés, tels d'innombrables éclats de verre, qui entaillent, imperceptibles, s'emparent du lecteur, le lacèrent aussi sûrement que cette ponctuation sans appel, qui refuse tout compromis, pour le laisser chancelant, hébété, sonné par le point final.

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    1. Bonsoir Franckie,

      Je viens juste de lire ton texte. Je n'ai pas lâché la lecture jusqu'à
      la fin. Le crépuscule commençait à tomber sur le Mékong, c'était
      magique, magnifique, et pourtant, j'étais tout à tes mots. Car tu as
      réalisé là ce que tout écrivain a le devoir, l'obligation de faire dès
      lors qu'il décide de parcourir ce chemin pavé d'émotions brutes,
      toujours violentes, parfois saignantes, qu'est l'écriture. On y est.
      On est en plein dedans. Jusqu'à la fin. C'est puissant, terrible,
      cramoisi de vérité.

      C'est mordant, tourbillonnant, désespérant, incisif, drôle, même quand
      on ne devrait pas rire; du tout Franckie, en un mot!

      Il y a un crescendo jusqu'à l'apothéose, la tension monte, s'agrippe,
      bouillonne, jusqu'au point final. La phrase qui laisse sonné. C'est
      tellement juste que ça glace jusqu'à la moelle. Et, bien sûr, on est
      complètement rentré dedans. Tu as ton lecteur, tu l'as tout à ta
      cause, il ne peut qu'acquiescer.

      Du grand art. J'aime beaucoup le commentaire "ton écriture est un
      scalpel qui autopsie le coeur". C'est exactement ça.

      Je t'embrasse très fort et te dis encore "bravo".

      AnnaJo

      merci de ton retour d'auteure
      tu connais les circonvolutions par où l'on se doit de tracer. beau réveil sur le Mékong et bon voyage au laos



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    2. L'écriture est le plus beau des cadeaux lorsqu'il nous est offert par une plume aussi juste que la tienne.

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